Père de la légende Khabib Nurmagomedov, mentor d'Islam Makhachev et patriarche de la dynastie des Nurmagomedov dans le MMA mondial, Abdulmanap Nurmagomedov est sans conteste le coach de MMA le plus important de l'histoire du Caucase, ayant notamment été nommé meilleur entraîneur de sambo dans le livre des records russe de 2019, et ayant aussi été décoré du titre de Maître des Sports en lutte libre !
Les pères jouent souvent un rôle important dans le parcours des grands champions : on pense bien sûr à Michael Jordan dans le monde du basket-ball, qui a toujours été encouragé par son père à poursuivre une carrière sportive. Dans le monde du MMA, rares sont les entraîneurs à avoir acquis une stature aussi révérée qu'Abdulmanap Nurmagomedov, père de Khabib Nurmagomedov, dont les succès de son fils sont en majeure partie dus à la rigueur et au sens du travail transmis par son père.
Né en 1962 au Daghestan, Abdulmanap Nurmagomedov commence très tôt à pratiquer la lutte, dès ses 8 ans. Un parcours commun chez de nombreux enfants et jeunes hommes originaires du Caucase, puisque dans ces régions montagneuses, le combat fait parte intégrante de la culture locale, et les garçons sont fréquemment encouragés à apprendre à se battre dès leur plus jeune âge.
S'l excelle déjà dans cette discipline sportive, Abdulmanap ne s'épanouira pleinement dans les arts martiaux qu'à partir de 1981, année durant laquelle il rejoindra l'armée rouge, et y découvrira le sambo et le judo. Au sein du corps militaire, il développe davantage ses compétences martiales, mais il en apprend aussi encore plus sur la discipline, la rigueur et la dureté du monde.
Il se démarque déjà de ses nombreux frères d'armes par ses multiples succès et récompenses dans diverses compétitions de grappling et de lutte organisées dans son régiment.
Après avoir quitté l'armée, Abdulmanap acquiert sa première grande réussite en tant qu'entraîneur lorsque son frère, Nurmagomed Nurmagomedov, devient grâce à lui champion du monde de sambo en 1992 ! On estime d'ailleurs le nombre de champions de sambo coachés par Abdulmanap Nurmagomedov à 18, dont Ikram Aliskerov, qui a récemment affronté Robert Whittaker chez les middleweight de l'UFC !
Lorsque le bloc soviétique s'effondre en 1991, de nombreuses tensions apparaissent dans le Caucase et dans une majeure partie des pays de l'est, dont le Daghestan. La guerre et les violences font rage. Afin d'éviter à un grand nombre de garçons et de jeunes hommes de se tourner vers le terrorisme et l'extrémisme religieux, Abdulmanap décide de mettre à profit ses connaissances acquises dans les sports de combat pour fonder un club de lutte à Makhatchkala, la capitale du Daghestan.
Là-bas, il y formera son fils Khabib, mais aussi ses neveux Umar, Usman et Abubakar Nurmagomedov à la pratique des arts martiaux,et en premier lieu la lutte, ainsi que les sports de grappling tels que le judo et le sambo.
Abdulmanap s'expliquait d'ailleurs sur cette approche spécifique du combat au travers des mots suivants :
Je pense que le sambo est l'une des meilleures bases pour se tourner ensuite vers le MMA, puisqu'il demande déjà d'avoir de bonnes bases en striking, en lutte et en grappling. Si l'on combine la lutte libre et le sambo, vous obtenez un des meilleurs styles pour venir à bout de vos adversaires.
Difficile de lui donner tort sur ce point : le style de combat suffoquant de ses élèves, parmi lesquels son fils Khabib ou encore l'actuel champion lightweight de UFC Islam Makhachev, a prouvé qu'il était extrêmement difficile de trouver une solution efficace pour venir à bout des combattants daghestanais, qui sont simplement trop complets et polyvalents pour être battus !
Abdulmanap Nurmagomedov a toujours gardé en tête la même vision d'un combat, qu'il détaillait plus amplement en ces termes :
Un combat se déroule en deux temps : debout, puis au sol. Lorsque l'on est debout, on peut venir frapper et saisir l'adversaire. C'est comme ça que j'aime travailler avec mes élèves ; on cherche systématiquement à toucher, puis saisir, et enfin faire basculer l'adversaire au sol. Une fois par terre, on travaille principalement sur du ground-and-pound et sur différentes techniques de soumissions.
Cette manière très précise et rigoureuse d'approcher un combat selon Abdulmanap, également nommée "father's plan" par Khabib et Islam Makhachev, est encore largement utilisée par de nombreux combattants d'origines daghestanaises. Ses neveux Usman et Umar Nurmagomedov ont chacun respecté scrupuleusement ces consignes afin d'acquérir chacun un palmarès de 17 victoires professionnelles pour aucune défaite !
Le contrôle et la domination de l'adversaire sont les deux éléments centraux des gameplans mis en place par Abdulmanap Nurmagomedov qui cherchait continuellement à neutraliser et écraser ses adversaires en mobilisant la lutte et le grappling.
Malheureusement, après avoir donné naissance à l'une des plus grandes dynasties de combattant du MMA contemporain, Abdulmanap Nurmagomedov s'est éteint des suites du Covid-19 le 3 juillet 2020, ce qui a notamment poussé son fils Khabib à se retirer définitivement du sport après sa victoire face à Justin Gaethje en octobre 2020. Sa carrière n'aurait jamais été sans son père, entraîneur et mentor Abdulmanap, ainsi The Eagle a-t-il choisi d'y mettre un terme à la mort de celui-ci…
L'héritage laissé par Abdulmanap Nurmagomedov continue encore de perdurer chez les nombreux combattants qu'il a pris sous son aile, et ses méthodes d'entraînement ont largement servi à démocratiser l'usage intensif de la lutte dans le MMA à très haut niveau.
Par Pierre Yan.
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